Celle-ci dura, dit-on, cent ans.
Comme la grêle et la peste, la guerre s'abat sur la campagne lorsque le blé est lourd et la fille jolie... La Mariotte est jolie.
Du soir ou du matin, le crépuscule s'étire entre lumière et ombre, comme entre chien et loup. Le Chevalier est loup.
Ces deux-là méritaient un compagnon fidèle. Mais l'Anicet est lâche...
La piste de l'oeuvre :
Dans cette version intégrale est rassemblée la trilogie des Compagnons du Crépuscule :
- Le sortilège du bois des Brumes
- Les yeux d'étain de la Ville Glauque
- Le dernier chant des Malaterre
Nous suivons donc à travers ces trois tomes, les aventures de Mariotte (la jeune et jolie fille suspendue par les pieds sur la couverture), de l'Anicet (celui qui tient la torche et profite du paysage) et du Chevalier (forcément, celui avec un casque et une épée...)
Mariotte est un peu "tête-brûlée", pleine d'audace... et de formes généreuses comme sait le faire Bourgeon dans ces œuvres.
L'Anicet est lâche, idiot... et crétin! Cela fait beaucoup pour un seul homme oui, oui, je sais...
Le Chevalier est celui qui va relier les deux autres personnages. Errant à la recherche de la Mort (ne vous méprenez pas, il n'est pas suicidaire, il veut "juste" la rencontrer et régler quelques vieilles histoires...), il avancera inéluctablement vers son destin au cours des volumes...
L'histoire se déroule lors de la guerre de Cent Ans mais les légendes y ont la peau dure, les lutins y parlent en rimes et les bêtes sauvages dévorent les imprudents...
La promenade des auteurs :
Le dessin de François Bourgeon est assez particulier, mais, en tous cas en ce qui m'a concerné pour Les Compagnons du Crépuscule, il est facile de s'y habituer, d'y prendre plaisir et de vouloir absolument lire la suite!
Il a par ailleurs une grande habilité pour entraîner le lecteur au cœur de son récit. Dans les Compagnons du Crépuscule, le discours est parfaitement adapté à l'époque et les rimes, le rythme de chaque bulles ou le vocabulaire utilisé aident à plonger dans cet univers si particulier.
François Bourgeon est aussi l'auteur de deux autres séries connues :
- Les passagers du vent dont on peut trouver le site officiel ici
- Le cycle de Cyann
C'est la première que l'on m'a le plus fortement conseillé, un récit criant de vérité sur la fin du XVIIIe, le commerce triangulaire et la vie en mer... A voir, elle m'intéresse beaucoup.
Mes pérégrinations :
J'ai longuement cherché ce que je pouvais dire de cette trilogie sans en dire trop... longuement!
Au final, je ne peux pas en parler sans aborder certains points, cela ne rendrait pas hommage au travail de l'auteur. Je vais donc essayer d'en dévoiler le moins possible, je ne vais pas raconter toute l'histoire, mais si vous désirez ne rien savoir des ficelles de cette histoire (rien de rien de rien de rien du tout... mais que faites vous encore à lire cet article si tel est le cas?), alors méfiez vous...
- Les femmes
Il est impossible de parler des Compagnons du Crépuscule sans parler des femmes dans les œuvres de Bourgeon.
N'ayant jamais lu ses œuvres, j'y ai trouvé un dessin dans lequel les femmes arborent leur formes généreuses sous des tissus parfois très légers... ou sont même dévêtues. Et force est de constater qu'au feuilletage de ses autres œuvres, il en est souvent de même.
Mais, "la Mariotte est jolie" ...
Les mots sont parfois crus mais aussi souvent très joliment dits, quelque soit leurs sous-entendus, ce qui donne beaucoup de charme et valorise l'ambiance de l'histoire. Une petite citation pour illustrer :
"Si la brillance de tes yeux traduit l'ardeur de ton pieux désir, je te vois qui chemine en sainte et belle route... J'ai cependant bien peur que cet humide éclat ne soit que le pudique reflet d'autre moite luisance que tu sais mieux cacher..."
Cependant les femmes n'en ont pas un rôle moins important pour autant, qu'il s'agisse de notre héroïne, de Yuna, ou des trois sœurs qui jouent toutes des rôles essentiels.
Sans les femmes, cette oeuvre n'est rien.
- Le rêve et la réalité
Qui est le rêveur qui rêve que les autres personnages sont dans son rêve?
La distinction entre les deux mondes, celui du rêve et celui de la réalité, est assez floue. En fait, je dirais même plus, je dirais très floue! C'est le but et c'est la base du rôle des Lutins je dirais. En effet ces petites créatures qui sont à la fois dans les rêves des personnages (des rêves communs...) et à la fois en dehors semblent jouer le rôle de passerelle et apportent un petit plus inqualifiable au mysticisme de l'histoire.
Malgré cela, pour ma part, c'est le point faible. Frontière parfois trop floue entre passé et présent, entre rêve et réalité. Un point faible car cela m'a demandé une grande concentration et parfois la relecture entière de certains passages.
- La Vie, l'Amour, la Mort
Les Trois Forces, la Vie, l'Amour, la Mort, rythment tout ce récit.
Elles sont la base de l'histoire, la base de la quête du chevalier et la base de la conclusion. Chaque personnage et chaque évènement joue sur l'une de ces Forces (Carmine et Mariotte? Jacot? Yuna? Réfléchissez-y... Tout le monde je vous dit!!!)
C'est un vrai plaisir de voir à quel point chaque chose a été réfléchie de façon à être rattacher, à chaque fois, à l'une des Trois Forces. Chaque chose a sa place, tout est étudié pour...
Le troisième tome est le plus parlant en ce qui concerne cette trame grâce à la prise d'importance de l'histoire de Blanche, Carmine et Neyrelle, les trois sœurs, incarnation pure et simple de chacune des Forces. Ce tome dénote fortement des deux premiers : une fois les personnages arrivés en ville, l'histoire semble plus lente, moins mouvementée malgré les fort enjeux présents et le mystique présent dans les volumes précédents disparaît, laissant tout la place pour ce jeu de Forces
Cela nous amène d'ailleurs à une conclusion d'une précision fulgurante, une conclusion heureuse malgré la mort de nombreux protagonistes :
"Chaque créature détient une partie du pouvoir des forces de la vie.
Tant qu’il y aura en ce monde un ventre de mère ou un épi de blé,
le maitre de la Mort n’aura pas la victoire."
Tant qu’il y aura en ce monde un ventre de mère ou un épi de blé,
le maitre de la Mort n’aura pas la victoire."
Une conclusion qui, soit dit en passant, vous était déjà annoncée dés le premier tome! ;-)
J'ai été particulièrement touchée par l’enchaînement des évènements dans les dernières pages, leur symbolique et leur puissance dans la mise en scène.
Mais où cela m'a-t-il donc mené?
Malgré quelques passages au cours desquels il a fallut que j'attache solidement mon petit cerveau pour pouvoir suivre parfaitement tout ce qui se disait, tout ce qui se tramait et tout ce qui était sous-entendu, cette BD a été une excellente lecture.
Cela me mène à me dire! Corne de bouc, il faut que je lise au moins Les Passagers du Vent.
François Bourgeon a mis tant d'ardeur à nous livrer ici un récit parfaitement ancré dans un contexte historique (dialogues, costumes, mœurs...) qu'il serait dommage de passer à coté de cette autre série!
J'ai lu ces BDs il y a bien longtemps mais qu'est-ce que c'était bien ! Et, oui, il faut absolument lire Les passagers du vent qui est encore mieux !
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